Insondable, Ego !
Par mollesse et inertie j’ai accepté Ego pour confident. À qui d’autre confier mon désarroi ? Il ne faut pas être trop regardant sur la qualité.
Mais je ne vous ai pas encore présenté Ego. Hasardons une esquisse. Comme moi, il a le visage rond, la bouche grande et le sourire idiot. Sans dignité ni assurance. Et, il aime la palinka. Beaucoup de signes indiquaient qu’il pouvait être mon unique et singulier confident. Le seul, mieux que tout autre, à apprécier et comprendre mes déréglages de toutes sortes, à confondre mes hérésies hadales. Et le seul à accepter de jouer le rôle de serviteur dévoué. Quoique. Ego, c’est mon directeur de conscience, qui me donne la foi révolutionnaire, mon grain d’anarchie, mon intuition et ma respiration. Il répudie mes habitudes confortables, secoue ma procrastination et possède ce don redoutable de lucidité. Et de mystère. À ce jour, je n’ai pas encore réussi à le cerner.
Ni à lui résister.
J’ai confiance en lui, toujours sur le qui-vive. Seul côté négatif de cette collaboration : ses rots et ses vents réguliers viennent déranger mon inspiration.
Cette nuit-là je ne dormis guère, hanté par la vision lancinante de son apparition, enchevêtrement de sensations incompréhensibles et douloureuses.
Le matin, je me réveillai fort tard. Comme tous les matins. L’idée me traversa que, peut-être, la palinka allait m’aider, réveiller mon cerveau assoupi. Mais Ego guettait. Ma mauvaise conscience veillait au grain. Ego et son esprit obtus !