On écrit. Envers et contre tout.
On écrit. Envers et contre tout.
On prend la plume et on écrit. On se laisse aller à la morsure du mot, sans lui résister, on provoque, on fustige la notion figée du bien et du mal, du beau et du laid. On croise les frontières du réel et de l’irréel, des désirs et des fantasmes. Des frissons qui crient matin.
Dans ces moments d’exaltation, on n’écrit que des mots damnés. Une descente aux tréfonds de soi-même, comme si des torrents impétueux nous emportaient vers les filets de la force obscure. On rêve de sa vautrer dans la luxure, entre les jambes d’une vieille édentée, aux lèvres desséchées, à la poitrine flasque. Qui ne parviendra pas à refroidir vos ardeurs. Sucer ses mamelles et ne pas oublier de se laver le sexe. Pourquoi voulez-vous qu’il y ait toujours amour ? On rêve de refaire la gueule d’un prétentieux gigolo, pas du tout adapté à la vie pratique, lui arracher le cœur, remodeler ses chairs à l’ombre scintillante d’une rue déserte. Le voir crever en héros, admirer les chiures de mouches et trinquer au mousseux. Sans états d'âme, il aura sa gloire posthume…
Cessons ces voyages insipides dans la routine. Il y a tant de joyeusetés dans la vie ! Il est absurde de ne s’en tenir à l’oiseau qui chante, même si le gazouillis est doux et agréable !
Je vous le dis, c’est cela aussi écrire : braver le vent cinglant, montrer l’irreprésentable. Se vautrer dans ses paysages désolants. Plutôt que de s’endormir dans la paresse, autoriser ses démons à s’assoir dans nos jardins. Écrire, sous la contrainte d'un tord-boyaux donne courage...
Laissez-moi écrire. Envers et contre tout. Vous comprenez ? Sinon, ça sert à quoi cette existence ?
Laissez-moi écrire. Et, sombrer dans un sommeil vide. Ainsi le poète se meurt. Avec ses tempes à peine argentées. Dans ce monde de turgescences. Un jour de pluie. Sans corde tendue.
Mais... ça ne vous fait ni chaud ni froid ?